La lettre des décideurs

Regards croisés du secteur agroalimentaire

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NOUVEAU CALENDRIER DES NEGOCIATIONS COMMERCIALES 2024 : QUELS ENJEUX POUR LES INDUSTRIELS ?

Nouveau calendrier des négociations commerciales 2024 : descriptif du dispositif et sur l’intervention du tiers indépendant de l’option 3

La loi du 17 novembre 2023 a pour objectif final de faire baisser les prix des produits de grande consommation et ainsi contribuer à combattre l’inflation alimentaire.

Le législateur ayant parié sur une baisse des prix des matières premières en 2024, a souhaité avancer le cycle annuel des négociations commerciales entre fournisseurs et distributeurs sur les produits de grande consommation afin de faire bénéficier au plus tôt les consommateurs de cette baisse de prix, dès janvier 2024 au lieu du mois de mars 2024.

Ce nouveau calendrier doit notamment s’appliquer dans le cadre du dispositif mis en place par la loi dite “Descrozaille” du 30 mars 2023.

La modification du calendrier des négociations commerciales a un impact significatif sur la gestion opérationnelle des négociations par l’ensemble des opérateurs économiques. Nous constatons que l’option 3 est celle la plus largement retenue par les industriels. Elle nécessite une mobilisation forte des entreprises pour pouvoir répondre aux textes réglementaires.

Le Commissaire aux comptes, étant le dernier maillon du processus, doit également être en capacité de s’adapter sur une période courte et mobiliser les ressources pour pouvoir délivrer les attestations dans les délais impartis.

On peut toutefois s’interroger sur l’efficacité de ce nouveau dispositif dépendant largement d’un contexte économique incertain, ne permettant pas d’assurer la baisse des prix des matières premières.

Nul doute que cette loi aura pour effet d’alimenter encore un peu plus les tensions dans le box des négociations !

LE POINT DE VUE DE L’AVOCAT

La loi du 17 novembre s’applique à « toute convention portant sur des produits de grande consommation commercialisés sur le territoire français conclue entre tout distributeur exerçant une activité de commerce de détail à prédominance alimentaire et tout fournisseur de produits de grande consommation ».

Deux calendriers de négociations doivent être distingués pour les négociations commerciales 2024 :

  • Fournisseurs dont le chiffre d'affaires est inférieur à 350 millions d’euros :
    • Date limite de communication des CGV par le fournisseur au distributeur : 21 novembre 2023,
    • >Date butoir de conclusion : 15 janvier 2024, avec une prise d'effet au 16 janvier au plus tard.
  • Fournisseurs dont le chiffre d'affaires est supérieur ou égal à 350 millions d'euros :
    • Date limite de communication des CGV par le fournisseur au distributeur : 5 décembre 2023,
    • Date butoir de conclusion : 31 janvier 2024, avec une prise d'effet au 1er février au plus tard.

LE POINT DE VUE DU COMMISSAIRE AU COMPTE

Pour rappel, la loi dite « Descrozaille » ou « Egalim 3 » est venue modifier le calendrier d’intervention des tiers indépendants pour les industriels qui ont opté pour l’option 3 :

  • Une attestation ex ante est dorénavant nécessaire dans le mois qui suit l’envoi des CGV : son objectif étant de sanctuariser l’évolution du prix des matières premières dans le tarif général,
  • Une attestation post négociation est nécessaire dans le mois qui suit la fin des négociations commerciales, matérialisée par la convention signée avec l’enseigne : son objectif est de préserver l’évolution du prix des matières premières dans le tarif net remisé.
  • Avec l’avancement du calendrier, la gestion opérationnelle de l’option 3 devient complexe tant pour les industriels qui doivent produire des informations financières dans un délai restreint, que pour les cabinets d’audit qui doivent contrôler ces informations en respectant le délai prévu par la Loi (sous un mois dès réception des éléments fournis).

En tant que Commissaires aux comptes, nous constatons que le choix des indices de référence par l’industriel est primordial car cet indicateur détermine la base de négociation de révision de prix entre les parties. Un choix erroné peut avoir des conséquences lourdes sur sa la performance économique.

Par ailleurs, les interprétations restent divergentes dans le cadre de la négociation commerciale portant sur les contrats à marque distributeur. Nous pouvons constater que certaines enseignes demandent aux industriels l’envoi de CGV alors que la négociation est soumise au contrat commercial (hors CGV) selon l’article L110-1 et suivants du code de commerce. Une saisine auprès de la CEPC a été initiée afin de clarifier le dispositif.

NEGOCIATIONS COMMERCIALES : LES ELEMENTS CLES

« Avec un recul de plus d’un an sur 15 janvier 2024 l’application de la loi Egalim 2, nous pouvons noter qu’un choix erroné d’indice de référence par l’industriel dans le cadre des CGV peut être lourd de conséquences sur sa performance économique. Toutefois nous pouvons constater que la loi Descrozaille a permis d’apporter une clarification des pratiques dans la négociation des marques nationales, bien que des interprétations puissent être divergentes concernant le traitement des contrats à marque distributeur. »
Kristell Dicharry, Associée, Commissaire aux comptes

« Dans un contexte d’inflation structurelle alimentée notamment par la récurrence des crises internationales, le prix des produits de grande consommation dans la grande distribution s’envole et le Gouvernement tente en urgence de protéger le pouvoir d’achat des consommateurs. »
Sarah Hagani, Avocat Associée